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Les fibres des masques : C’est à l’occasion du Dama que les hommes taillent de nouveaux masques et préparent les fibres de leur costume hors du village. Les longues jupes noires qui ondulent jusqu’aux chevilles sont faites en fibres de sansevière (Polo). Ces plantes poussent en touffes dans des endroits sacrés. Il est dangereux de s'en approcher. Les histoires qui se terminent par une mort d'homme sont courantes. Avant de les cueillir et pour s'en protéger, on attache de vieilles fibres sur les avant-bras. Ainsi ce sont les « masques » qui font la cueillette et non les hommes. La préparation des fibres de sansevière prend environ une semaine et nécessite plusieurs lavages et séchages successifs. Des bains d’eau mélangée à de la terre et à des teintures végétales (Bala - Acacia Nilotica) imprègnent les fibres de leur couleur noire. Et enfin, l’huile de Sa (lannea microcarpa) leur donne leur brillance. Denise Paulme (Organisation sociale des Dogon) explique qu’à Sangha la période de préparation des fibres, s’appelle Anam Punia, ce qui signifie « menstrues des hommes ». Cette féminisation des hommes saute aux yeux lors des rites agraires qui ont trait à la fertilité du sol et à la fécondité des femmes : les danseurs y portent pagnes, foulards et colliers. Par contre, comment interpréter la signification de ces costumes de fibres rouges qui évoquent les « menstrues des hommes » ? L’ethnologue Walter Van Beek (Enter the Bush, a Dogon mask festival) suggère que la féminisation des masques correspond à une appropriation rituelle de la fécondité féminine par les hommes. En confisquant aux femmes l’instrument de pouvoir que sont les masques, les hommes se sont emparés aussi de leurs forces procréatrices. Les masques n’ont donc pas uniquement trait à la mort. Force est d’admettre que les masques comportent des significations cachées. L’idée de la menstruation masculine réapparaît dans un tout autre contexte. La maladie de la bilharziose s’accompagne de sang qui se mélange aux urines. Il s’agit d’un parasite qui s'attrape dans l'eau douce (jardins potagers, étangs, etc.). L’anthropologue Sidiki Tinta (Projets de santé et prévention en milieu dogon du Mali) explique que, dans certaines régions du pays dogon cet aspect sanguinolent de la bilharziose se dit Anam Punia, « menstrues des hommes ». Cette maladie y est considérée comme un signe de la fertilité pour les enfants qui en souffrent. |
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Mongui 2009 : sansevière / bowstring hemp |
Dini 2012 : newly dyed fibres for the upcoming Dama |
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Mask fibres : Men
carve masks on the occasion of the Dama ritual. The fibres are dyed
outside the village. The ankle length black underskirts are made of
bowstring hemp (Sansevieria). These plants grow in tufts in sacred
places. It is dangerous to come near to them. Stories about deadly
accidents abound. Prior to gathering the leaves, and as a means of
protection, old fibres are tied to one's forearms. This Way the « masks
» are doing the gathering and not men. The manufacture of the fibres
takes about a week. They need to be washed and dried several times as
part of the dye process. They are impregnated with a mixture of water,
black earth and a natural dye (Bala - Acacia Nilotica). Lastly, an
application of Sa oil (lannea microcarpa) is to provide a nice shine to
the fibres. Denise Paulme (Organisation sociale des Dogon) explains
that in Sangha this period of fibre dyeing is called Anam Punia, which
means « menses of men ». Male feminization becomes obvious in dancers
who wear women’s clothing (scarves and necklaces) during the agrarian
rites that address soil fertility and female fecundity. But how to
interpret the significance of red fibre costumes that symbolize male
menstruation ? Ethnologist Walter Van Beek (Enter the Bush, a Dogon
mask festival) suggests that the feminization of masks is to be seen as
a ritual appropriation by men of female fecundity. Masks are objects of
power. By taking them away from their women,
men have put an
end to female domination and, at the same time, seized control of their
reproductive powers. Thus masks have to do with more than just death.
One has to admit that Dogon masks bear hidden significances. This same
idea of male menstruation resurfaces in a totally different context.
People who suffer from bilharzia have blood in their urine. It is a
parasite present in fresh stagnant water (vegetable gardens, ponds,
etc). Anthropologist Sidiki Tinta (Projets de santé et prévention en
milieu dogon du Mali) explains that in certain parts of Dogon country
this aspect of the disease is called Anam Punia, that is to say, «
menses of men ». This condition is considered to be a sign of fertility
among the children who suffer from the disease. |