La Société des Masques :

 

     Les danses masquées se pratiquent à l'occasion des funérailles et du Dama. Elles sont régies par la Société des Masques. Cette société regroupe tous les hommes circoncis, jeunes et vieux. Les garçons y entrent après la circoncision. L'autorité s'établit selon l'âge. Beaucoup de membres taillent leur propre masque.

     Dans les temps mythiques, la mort n'existait pas. Les hommes se métamorphosaient en serpent. Pourtant, suite à la transgression d'un interdit, les Dogon furent exposés à la mort. La Société des Masques célèbre le culte du premier ancêtre mort sous forme de serpent suite à une rupture d'interdit. Depuis, la mort fut transmise aux hommes par contagion (A ne pas confondre avec l'ancêtre Lébé Seru qui est immortel).

     La Société des Masques est dirigé par un chef des masques. Amadingue Dolo était le chef des masques à Sangha (Wala Banga = chef de l'autel des masques). Il faisait partie des informateurs de l'équipe de Marcel Griaule. Amadingue Dolo est mort en 1985. Son Dama s'est tenu en 1992. La littérature ethnographique se réfère à la "Société Awa. Hors selon Amadingue Dolo le nom correct est Jeme. En Sigi So (la langue secrète du Sigui) Awa signifie Kanaga.



   
amadingue dolo - chef des masques
 
taille d'un masque singe
 
danseurs kanaga

 

Rites funéraires :

 

     Les rites funéraires se déroulent en trois temps : l'enterrement, les funérailles et le Dama.

     L'enterrement est effectué très rapidement après le décès. Après avoir lavé et enveloppé le défunt dans une couverture mortuaire, on hisse le corps avec des cordes vers son dernier lieu de repos dans la falaise. La paroi est truffée de grottes dont certaines servent de cimetières. On récupère la couverture. Lors des funérailles elle sera le centre du rituel du Baga Bundo. Sur le plateau les cimetières se trouvent dans des grottes non loin des villages.



   
yougo dogorou
 
yougo dogorou
 
cimetière de yougo dogorou

 

     Les funérailles (Yimu Gono) se tiennent quelques jours ou même plusieurs mois après que la dépouille du défunt a été déposé au cimetière. Les funérailles servent à reéquilibrer l'harmonie entre le monde des vivants et celui des morts. L'âme du défunt doit être conduite vers l'au-delà.

     Le Dama marque la fin du deuil et le passage de l'âme du défunt au pays des ancêtres. Ce rite a lieu vers mai/juin. Il y a un "petit" et un "grand" Dama. Le petit Dama se pratique régulièrement et ne concerne qu'un défunt. Par contre, le grand Dama est exécuté pour plusieurs morts. De longues années peuvent s'écouler entre deux Dama ; dix à 12 ans et encore d'avantage. Auparavant ce rituel exigeait un sacrifice humain. Aujourd'hui cette pratique a été abandonnée.

 

Les funérailles (Yimu Gono) :

 

     La plupart du temps les funérailles se font de décembre à février. Les récoltes ont été engrangées et les semailles ne débuteront que dans quelques mois. Les travaux agricoles sont terminés et hommes et femmes se vouent à d'autres occupations. C'est le moment d'organiser des funérailles. Elles durent 2 à 3 jours. De nombreux visiteurs viennent présenter leurs condoléances auprès de la famille du défunt.

     Danses et combats fictifs (par exemple contre l'ancien ennemi peul) se succèdent de jour et de nuit. Villageois et visiteurs miment des combats sur la place publique. Ils tirent des coups de fusils à blanc et se battent avec boucliers, lances et torches en feu. Par moments le bruit est étourdissant et la poudre des tirs enveloppe les participants dans un nuage de fumée. L'ambiance est festive.

 

 

   
kundu andou




 
yougo dogorou



 
kundu gina



         
   
kundu andou
 
yougo dogorou
 
kundu andou

 

     Les moments forts de la cérémonie se déroulent sur le toit en terrace de la maison du défunt. Des effets personnels du disparu, tels que bouclier et lances, y sont déposés. Au cas où il s'agit d'un ancien combattant, alors un mannequin avec casque et uniforme militaire sont mis en évidence.

 

 

   
kundu andou




 
kundu andou




 
kundu andou




         
   
kundu andou
 
kundu andou
 
kundu andou

 

      Quelques vieux dignitaires et proches parents montent sur le toit et y font le sacrifice d'un bouc. Dans les villages de Kundu il est castré avant sa mise à mort, ensuite sa dépouille est jetée à terre. A Yougo Dogorou l'animal n'est pas castré. Après le sacrifice le sacrificateur lui enlève la peau et abandonne sa carcasse sur le toit de la maison. Les pratiques rituels varient de village en village. Ensuite c'est au tour des masques de monter sur le toit et d'y danser. Toutes ces activités rituelles ont pour but d'attirer l'âme du défunt sur la terrace et de préparer son départ vers l'au-delà.

 

 

   
kundu andou




 
yougo dogorou




 
kundu dogomo




         
   
kundu andou




 
yougo dogorou




 
kundu gina




         
   
kundu andou
 
yougo dogorou
 
kundu gina


      Les danseurs rendent un dernier hommage au mort et descendent du toit. C'est un moment très important. Un des danseurs, un fils ou un frère du défunt, resté seul sur la terrasse, s'agenouille, gratte le sol de ses mains et jette la poussière par-dessus la tête. Il est à la recherche du kine (une composante de l'âme) du défunt qui retournera en tant que nani (répondant) dans un nouveau-né.

      Signification du Nani : Le défunt choisit parmi ses descendants un répondant qui à l'âge adulte devra régulièrement abreuver l'âme de l'ancêtre sur l'autel du wagem. C'est en transmettant une part de son âme que le défunt "passe le relais" à un descendant. Il s'agit d'une forme de réincarnation.



   
kundu andou
 
kundu andou
 
yougo dogorou


     Si le défunt laisse derrière lui une veuve alors ce même rituel se déroule différemment. Dans ce cas le danseur masqué s'agenouille à l'entrée de la maison et présente ses respects à la veuve qui, tenant une calebasse à la main, cherchera le kine de son mari disparu.



   
kundu andou
 
kundu andou
 
kundu andou

 

voir :

  • Polly Richards " Imina Sana : (masques à la mode) - A study of Dogon Masquerade at the Turn of the Millenium 1994-2000 page 149 "
  • G.Dieterlen " Les âmes des Dogons - pages 126/127 "