Plaine du Séno-Gondo :

 

     L'histoire du peuplement du Séno-Gondo et du Yatenga voisin est complexe. La région est une mosaïque culturelle que se partagent Samos, Peul, Kalamse, Dogon, Mossi et Kurumba. A l'image des populations des rives du fleuve Niger, les habitants de ce vaste territoire ont été secoués depuis le moyen-âge jusqu'à la colonisation française par des puissances guerrières qui, tour à tour, y affirmèrent leur suprématie.

 

     Tout comme leurs contemporains Tellem dans la falaise, les Kibse/Dogon ont laissé leur empreinte au Yatenga (voir page 05). Les conquêtes territoriales Songhay et Mossi du 15e siècle ont finalement mis un terme à leur présence dans la région. Ils abandonnèrent leurs territoires aux Kurumba et Mossi et cherchèrent refuge auprès d'autres groupes Dogon installés plus au nord vers la falaise de Bandiagara. Par la suite, Mossi, Bambara et Peul se sont disputés la région des siècles durant. Les peuples de la plaine subirent guerres, razzias et famines. Au gré des forces en présence, ils furent assimilés à de nouvelles structures politiques ou se dispersèrent pour trouver refuge auprès de groupes parents ou alliés (plateau Dogon au nord ou Yatenga au sud). Ce processus de démantèlement et de dislocation des populations de la plaine s'est répété à maintes reprises. Les opérations Peul, Mossi et Bambara ne cessèrent qu'avec l'arrivée des français au 19e siècle.

 

     Les Songhay, Mossi et Peul étaient des sociétés guerrières qui étendirent leur domination sur des territoires nouvellement conquis en y installant des réseaux de chefferies villageoises. Ce sont des unités politiques autonomes composées de plusieurs villages dont l'autorité revenait à l'élite conquérante. Toutefois, les populations autochtones, bien qu'ayant un statut moindre (captifs, gens de caste, etc), y gardèrent leurs prérogatives en tant que "maîtres de terre", c'est-à-dire, propriétaires du sol. Dans ce type de communauté, l'élite dirigeante et les autochtones se distinguent par leur patronyme.

 

     Le chercheur Eric Jolly explique que la région Tomo (sud-ouest du Séno) est divisée en confédérations villageoises regroupant chacune une douzaine de villages sinon plus. A l'époque précoloniale, chaque confédération formait une union politique disposant d'une armée qui permit de s'opposer aux envahisseurs. En pays Dogon ce type d'union régionale est un cas unique car, en règle générale, les Dogon ne connaissent pas de systèmes de pouvoir centralisé. D'ordinaire l'autorité politique et religieuse s'exerce au niveau du village.

 

Ce n'est que depuis l'occupation française que les villages de la plaine (nouveaux et existants) se sont fortement développés dans un mouvement de colonisation agricole. Beaucoup de villages de la falaise ont installé un village "parent" dans la plaine. Les villages sont grands et espacés et les terres sont propices à l'agriculture. Les récoltes y sont souvent meilleures que sur le plateau. Les greniers pour stocker le mil sont de taille imposante. Aussi, la fabrication des briques en terre est une véritable industrie. Toutes les constructions de la plaine se font en briques car la pierre y est absente. Aujourd'hui les cultes animistes perdent de leur attrait et le tissu social des villages s'en retrouve modifié.

 


voir :

  • Bruno Martinelli " Trames d'appartenances et chaînes d'identité entre Dogons et Moose dans le Yatenga et la plaine du Sèno - Cahiers Sciences Humaines 1995"
    http://horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/pleins_textes_4/sci_hum/42877.pdf
  • J.Y. Marchal "Vestiges d'occupation ancienne au Yatenga - Une reconnaissance du pays Kibga - 1978" http://horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/pleins_textes_7/autrepart/010012979.pdf
  • Eric Jolly "Chefs sacrés et chefs de guerre dogon : deux pôles du pouvoir"
    http://www.mmsh.univ-aix.fr/iea/Clio/BOUJU5.pdf

 

 

 

   
koporokenié pé
 
koporokenié pé
 
koporokenié pé
         
   
oropa
 
village peul
 
construction d'un puit
       

 

 

Architecture et religion traditionnelle :

 

          L'architecture, l'organisation sociale et la religion sont indissociables. Habitations et lieux de culte se confondent. Quatre cultes régissent la vie religieuse :

  • Le culte du Wagem s'adresse aux ancêtres de la grande famille.

  • Le culte du Lébé garantie la fertilité et le renouvellement de la terre et du peuple Dogon.

  • Le culte du Binou maintient l'harmonie entre la communauté humaine et les forces surnaturelles de la brousse.

  • La société des masques dirige des rites publiques permettant le transfert des défunts vers l'au-delà. Par opposition aux cultes du Wagem, Lebe et Binou, la société des masques n'a pas d'édifice architectural comme lieu de culte. Les masques représentent la brousse et ses mystères. Rites et sacrifices se font dans une grotte hors du village.

     Bien entendu, citons la mosquée comme cinquième lieu de culte. Aujourd'hui l'islam est une composante importante de la vie religieuse Dogon et la mosquée fait partie intégrante de son paysage architectural.

     Ci-dessous une description des principaux types de construction qui forment un village et des cultes qui leur sont liés :

 

Le Ginna (associé au culte du Wagem) :

 

     C'est la maison du fondateur du village, c'est-à-dire, le siège du lignage patrilinéaire. Le doyen parmi ses successeurs tient le rôle de chef de la grande famille, le Ginna Banga. Un grand village est constitué de plusieurs quartiers. Chaque quartier a son propre Ginna. Il s'agit d'une construction à deux étages : le Ginna Banga habite au rez de chaussé, au 1er étage est entreposé le mil appartenant à la grande famille et sur la terrasse se trouve l'autel des ancêtres, le Wagem. C'est un ensemble de poteries dont chacune correspond à un ancêtre : celle du fondateur, de ses successeurs et de tous les hommes du village ou du quartier. Le culte du Wagem permet aux hommes de maintenir un dialogue avec leurs ancêtres directs. On y commémore aussi les ancêtres d'un lointain passé dont personne ne se rappelle. A différentes occasions les membres du Ginna feront des sacrifices sur l'autel. Le Ginna Banga est responsable du culte.

Voici deux exemples de rituels pratiqués à Sangha :

     a) rituel du Gorou : Une fois par année (décembre/janvier), chaque Ginna du village commémore l'ensemble des ancêtres de la famille étendue. Des sacrifices sont exécutés sur les poteries et les âmes des défunts viennent s'y abreuver. C'est aussi à cette occasion que les responsables du Ginna déterminent s'il est temps d'organiser un Dama (levée de deuil) pour les membres disparus ces dernières années. S'ils sont en faveur de la tenue d'un nouveau Dama, alors ils demandent au Hogon d'obtenir l'accord de tous les Ginnas du village. En cas de refus, une nouvelle demande pourra être faite lors du prochain Gorou. La tenue d'un Dama est coûteuse en produits agricoles. Des mauvaises récoltes sont la cause principale de l'ajournement d'un Dama (voir Dama - page 35)

 

     Le rituel du Gorou ne se limite pas uniquement au Ginna. Chaque famille maintient à la maison un autel pour leurs ancêtres proches. C'est le Tirè Kabu. On y commémore les membres de la famille encore présents dans l'esprit de tous.

     b) Le rituel du Kikinu Mono (= rassembler les âmes) : Avant la tenue du Dama, les âmes des défunts récents errent en brousse à proximité des villages. Le rituel du Kikinu Mono a lieu après le Dama et va permettre le transfert des âmes au statut d'ancêtres. C'est alors que de nouvelles poteries seront ajoutées à l'autel. D'après mes informations le Kikinu Mono se pratique dans le Tirè Kabu uniquement.

 

Voici une sélection de photos de Ginna couvrant l'ensemble du territoire :

 

 

   
sangha : ogol ley




 
sangha : ogol ley




 
sangha : ogol ley




         
   
sangha : ogol da




 
sangha : dini




 
sangha : bongo




         
   
sangha : sangui




 
banani amou




 
banani amou




         
   
ibi




 
yanda




 
kassa




         
   
dalekanda




 
wakara




 
andiou




         
   
saoura koum




 
samari




 
tintam




         
   
kamba bandie




 
kamba sinde




 
kamba sinde




         
   
kamba sinde




 
mendeli guine doulou




 
mendeli guine doulou




         
   
gono orey

 

 
gono orey

 

 
gono orey

 

 

   
mendeli guine doulou




 
gono mo




 
gono mo




         
   
gono mo




 
gono mo




 
gono mo




         
   
konsogoule

 
niongono

 
nando