Tiogou - Irou Komo : L’art rupestre en pays dogon est un domaine mal connu, que l’on associe à des activités consacrées aux masques et à des rites de circoncision. Non loin de Tiogou se trouve une paroi où figurent des repésentations de masques. L’endroit s’appelle Irou Komo, ce qui signifie « grotte des seins ». Ces dessins sont antérieurs à la venue des Sangara en ce lieu et appartenaient, selon leurs dires, au vieux village de Goumosongo.

D’ordinaire, les représentations rupestres de masques sont liées aux pratiques cultuelles de la « société des masques ». Pourtant, le nom de la paroi se réfère aux femmes du village de Goumosongo, qui s’y habillaient avant d’aller au marché. S’agit-il alors d’un ancien lieu de culte dont l’emplacement, après abandon, a été réutilisé par des femmes pour des raisons en apparence sans lien avec les masques ? Cette histoire est d’autant plus étonnante que, chez les Dogon, femmes et masques ne font pas bon ménage. Les masques ont trait à la mort et mettent en danger la fertilité des femmes. Quel sens donner alors à l’histoire d’Irou Komo ? Le mythe de la femme qui a découvert les masques auprès des Andoumboulou peut-il y répondre ? C’est grâce aux masques que les femmes avaient un ascendant sur les hommes et c’est pourquoi ils leur furent retirés. Se peut-il que l'histoire d’Irou Komo soit une allusion aux temps mythiques, quand les femmes étaient supérieures aux hommes ?

Les peintures des grottes encore en usage sont rafraîchies dans un cadre rituel. Celles d’Irou Komo n’ont plus été repeintes depuis fort longtemps. A condition que les techniques de datation le permettent, serait-il encore possible d’en déterminer l’âge et de se faire une idée à quand remontent les débuts de la tradition des masques en cette partie du territoire ? Il a été suggéré que celle-ci est d’origine voltaïque. Les masques dogon présentent certes des similitudes avec ceux du Yatenga, mais ne faudrait-il pas explorer d'autres scénarios et envisager l'existence de traditions autochtones et importées qui ont interagi entre elles ? Le mythe de la découverte des masques auprès des Andoumboulou sous-tend une origine locale antérieure à l’arrivée des Dogon. D’aucuns pensent que l’usage des masques n’est guère antérieur au 18e -19e siècle. Les anciens exemplaires qui ont survécu au temps remontent rarement au-delà de cette période. Mais faut-il encore préciser que la durée de vie des masques est relativement courte. Abimés et hors d’usage, ils étaient abandonnés dans des « cimetières » qui leur étaient consacrés, des lieux à ciel ouvert où l’humidité et les termites avaient tôt fait leur travail destructeur. La statuaire dogon a été assez bien préservée au fil des siècles. Les masques, par contre, retournent pour la plupart à l’état de poussière. Retracer leurs origines historiques est chose difficile. Est-ce que l’étude de l’art rupestre serait en mesure de dévoiler une part méconnue de leur histoire ?




Tiogou - Irou Komo: The current state of knowledge on rock art in Dogon country is poor at best. It is most often associated with mask activities and circumcision rites. A rock face with painted mask representations can be found outside Tiogou. It is locally called Irou Komo and translates as « cave of breasts ». These paintings predate the arrival of the Sangara in the area. They say it belonged to the long gone village of Goumosongo.

Rock paintings representing masks are usually associated with cult practices held by the « society of masks ». Yet Irou Komo refers to a place where the women of Goumosongo got dressed before going to the market. Is it then an ancient and abandoned cult site that was later used again by women for reasons seemingly unrelated to the masks ? This story is all the more remarkable since women and masks do not go together well. Masks have to do with death and are a threat to female fertility. So how can we explain what is meant by the story of Irou Komo ? Could the myth of the woman who first discovered the masks shed some light on its meaning ? She confiscated the masks from the Andoumboulou. It was thanks to the masks that women held power over men and that is why they were taken away from them. Could it be that the story of Irou Komo is a reference to mythic times when female supremacy was the order of the day ?

Rock paintings in mask shelters and circumcision sites which are still in use are now and then redone within a ritual context. But those at Irou Komo have not been repainted for a very long time. In case archaeological dating techniques allow it, would it then still be possible to determine a time frame for the making of these paintings and to get an idea about the beginnings of mask traditions in this part of the land ? It has been suggested that mask traditions are Voltaic in origin. Dogon masks do certainly share stylistic similarities with those of the Yatenga. But should one not explore other scenarios and consider possible interactions between indigenous and imported traditions ? The myth of the discovery of the masks with the Andoumboulou suggests a local origin anterior to the arrival of the Dogon. Some are of the opinion that mask traditions do not reach beyond the 18th -19th century. The ancient pieces that have survived the onslaught of time rarely go beyond that period. It is true that the life span of masks is relatively short. Damaged and out of use, masks were left abandoned in special « cemeteries » consecrated to them. These were open places within the village periphery where humidity and termites would destroy everything over time. Dogon statuary has been well preserved over the centuries. But the ancient masks enjoyed a less favourable fate. Most simply returned to dust. Retracing the historical origins of Dogon masks is difficult at best. Maybe that the study of rock art could help in revealing a hidden part of their local history ?